Quand les livres commençaient à voyager
Entre club et syndicat professionnel, le Cercle de la librairie, créé en 1847, décide donc de mettre en place une structure en charge de promouvoir l’édition française à l’étranger. Longtemps confondues, les activités de librairie et d’édition conquièrent leur autonomie. Le réseau de librairies se densifie progressivement comptant une librairie pour 10 000 habitants à la fin du siècle. À partir des années 1830, les éditeurs sont désireux de faire connaître leurs publications à un large public en dehors de France notamment dans le domaine du scolaire et de l’éducation à l’image de Pierre Larousse et de Louis Hachette. De grandes marques éditoriales voient le jour à partir de cette période comme Calmann-Lévy (1836), Armand Colin (1870), Vuibert (1876) ou encore Hatier et Nathan (1871).
Si avec la défaite de 1870 la France traverse un moment de crise profonde, en marge de l’essor industriel de cette fin de 19è siècle, les politiques sentent que la culture - et au premier rang de laquelle le livre - est un formidable outil de diplomatie d’influence, même si on ne l’appelait pas ainsi à l’époque. L’adoption de la convention de Berne en 1886 est une étape importante de la protection des œuvres littéraires et artistiques. L’internationalisation du livre profite aussi à plein de la naissance des grandes Expositions universelles à partir de 1851 se déroulant d’abord en Europe, à Londres, Paris et Vienne puis dans le monde entier à partir de 1876. Du 1er mai au 30 octobre 1893, l’Exposition universelle se tient à Chicago sous le nom de Columbian World’s Fair et grâce à l’organisation d’une "exposition collective" par le Cercle de la librairie, une délégation de 36 éditeurs français dont les éditions Plon, Belin Frères, Hachette, Colin et Masson, peut y présenter leurs livres.
Les prix comprennent "la construction des cloisons et des meubles, le dédouanement, l’installation des produits, la représentation, le gardiennage et l’entretien de l’exposition collective, tout comme les frais de transport, le remballage et la réexpédition des colis pour le retour." Parmi les éditeurs présents à Chicago, la maison Hetzel, qui a publié Le Tour du monde en 80 jours de Jules Vernes en 1872 – livre qui illustre à merveille l’ère industrielle rendant possible le voyage des auteurs mais aussi des livres à travers le monde.
Le plan des stands des éditeurs français présents à Chicago, montre que l’activité du Cercle correspondait déjà beaucoup à celle du BIEF aujourd’hui dont la mission consiste toujours à accompagner le développement de l’édition française à l’étranger. Entre les foires, les rencontres en France et dans le monde entier, les études, les annuaires, les catalogues numériques, les webinaires et les programmes de formation, le BIEF propose désormais toute une panoplie d’outils aux éditeurs, libraires francophones, agents d’éditeurs et traducteurs – une mission qui ne cesse de se développer et de s’adapter aux différents contextes grâce à tous ceux et toutes celles qui la soutiennent et l’incarnent aujourd’hui encore.